Enquête publique – Quartier dit « Pavé Blanc – secteur I3F » – Paroles de Clamartois.e.s (2)
Il est procédé du lundi 22 mars 2021 à 8h30 au vendredi 23 avril 2021 à 17h30 inclus, à une enquête publique relative au permis d’aménager pour l’opération LE NÔTRE, projet d’aménagement du quartier dit « Pavé Blanc – secteur I3F », Place Georges Pompidou, route du Pavé Blanc et rue de la Porte de Trivaux à Clamart (92140), soumis à évaluation environnementale.
Cette étape importante du projet vise à recueillir les observations du public.
Vous pouvez déposer vos observations ici.
Observations de Pierre Carrive
Monsieur le commissaire-enquêteur,
J’ai choisi de m’installer à Clamart en 1997, pour sa proximité avec Paris d’une part, et son urbanisme raisonnable d’autre part. Je voyais alors Clamart ainsi :– le centre (ou le bas), plutôt pavillonnaire, en tout cas avec beaucoup de jardins
– le long de la D906, avec tout un tas d’activités industrielles, et un fort pouvoir d’évolution
– le sud (ou le haut), avec de grands ensembles de logements, qui étaient considérés comme des modèles du genre
Depuis quelques années, je vois Clamart changer à toute vitesse, dans un sens qui m’inquiète beaucoup. Si le centre est, dans les grandes lignes, à peu près épargné (à l’exception notable de la gare), les immeubles poussent comme des champignons sur la D906. Il y a bien sûr les deux immenses opérations dites Plaine Sud et Panorama. Mais aussi des quantités d’autres, disséminées tout le long de la D906. Je trouve pertinent de profiter de l’aménagement de la D906 pour y construire des logements. Mais le style uniforme de tous ces immeubles me désole. Et puis, là où il y a les milliers de logements déjà construits (Plaine Sud et Panorama) ou à venir (autour de la rue de Versailles), il y avait bien d’autres projets à imaginer, qui auraient pu répondre pour de vrai aux enjeux sociaux et environnementaux de notre époque. Là, il y a très peu d’activités. Clamart se transforme en ville-dortoir, avec un nombre de nouveaux logements démesurés. On estime qu’en quelques années la population de Clamart passerait de 53 000 habitants à 70 000.
Quant au sud, avec tous ses logements sociaux, on voit bien que la volonté est à nouveau de densifier. Un terrain, dit « îlot Bourcillière-Duval », qui aurait pu avoir un rôle collectif innovant, a déjà été livré aux promoteurs. Et maintenant, les 3F, donc.
Si cet ensemble n’a pas la même notoriété que la Cité de la Plaine en tant que référence de logement social collectif, il a été éminemment pensé dans un large contexte historique, urbain, économique, social et humain. À cet égard, le détruire est une faute culturelle.
Pour y connaître des gens qui y habitent, y être souvent allé pour rencontrer les habitants, j’ai le sentiment qu’il y fait plutôt bon vivre. Certes, il y a des problèmes de propreté et d’incivilités. En s’en donnant les moyens, qui seraient bien plus modestes que de détruire pour reconstruire, il serait facile d’y remédier : un meilleur entretien, plus de gardiens, une police de proximité plus présente… Le sentiment dominant est que ce quartier a été laissé à l’abandon. Certains habitants pensent même que c’était volontaire…
Une très importante rénovation a eu lieu ces dernières années, dont les locataires constatent l’efficacité en termes d’isolation. Certes, tout détruite pour reconstruire amènerait des logements encore mieux isolés. Mais quel serait le bilan environnemental global ? D’après les spécialistes, il serait largement négatif.
L’argument de la mixité sociale, mis en avant pour ce projet, est en effet à prendre en compte. Il semble cependant que cette mixité soit déjà présente, beaucoup de locataires ayant bénéficié du 1 % patronal, ou payant un surloyer. En tout cas, les habitants avec lesquels j’ai pu échanger se félicitaient de cette mixité, et ne se sentaient pas vivre dans un ghetto.
Et enfin, j’ai gardé pour la fin l’aspect de tout cela qui me choque le plus : faire partir des gens qui y vivent, parfois des décennies, et détruire leur cadre de vie. Le quartier a été extrêmement valorisé ces dernières années, avec l’arrivée de transports en commun. Les habitants actuels ont supporté tous les désagréments des travaux, et devraient maintenant laisser leur place à des occupants plus rentables ? Car il ne s’agit de rien d’autre que d’une affaire de gros sous. Et les méthodes mises en œuvre pour pousser les habitants à partir sont humainement indignes.
Pour toutes ces raisons, je suis opposé à ce projet dit « Le Nôtre », mais favorable à une prise en compte plus soigneuse de l’existant et des habitants.
Pierre Carrive